Premier abri des fondateurs de la Trappe de Mistassini en 1892. Un abri semblable a été utilisé par les pères à leur arrivée à Sainte-Justine

Premier abri des fondateurs de la Trappe de Mistassini en 1892. Un abri semblable a été utilisé par les pères à leur arrivée à Sainte-Justine

Le mouvement trappiste est un ordre dont les racines remontent au Moyen Age. Cette section vise à montrer les particularités du mouvement trappiste à l’époque de la fondation de la Trappe du Saint-Esprit de Sainte Justine. Ensuite, nous verrons l’histoire de cette communauté, une histoire qui débute en Europe, puis se poursuit au Canada et plus particulièrement à Sainte-Justine.

Photo – Livre du 125e anniversaire de Sainte-Justine, p.30. Archives de l’Abbaye cistercienne d’Oka.

Les Trappistes, qui sont-ils?

Les Trappistes sont des moines regroupés dans l’ordre Cistercien. Cet ordre est affilié à l’Église catholique romaine. Leur mode de vie, très strict, comprend trois grandes occupations:

  • l’office divin, soit la louange liturgique de Dieu au chœur.
  • le travail manuel (agriculture, confection de chocolat, de fromage).
  • la lecture spirituelle méditative, en particulier celle des Saintes Écritures ou des Pères de l’Église.
  • Les Trappistes, qui vivent retirés du monde, font vœux de chasteté, de pauvreté et d’obéissance.

Les moines, avant le Concile Vatican II, étaient répartis en deux catégories:

  • les religieux de chœur ou choristes (prêtres, assurent l’office divin par le chant choral).
  • les religieux convers (assurent les services domestiques)

La vie quotidienne

À l’époque qui nous intéresse (v.1865), les Trappistes de Sainte-Justine se levaient habituellement vers deux heures du matin. Les jours de fête, ils se levaient encore plus tôt, à minuit plus exactement.

Les moines n’étaient autorisés à parler qu’en cas d’extrême urgence. Les moines communiquaient par signaux la plupart du temps.

L’alimentation

Les Trappistes jeûnaient à partir de la fête de l’exaltation de la croix (14 septembre) jusqu’à Pâques (le dimanche après le 14e jour du 1er mois lunaire du printemps). Ils prenaient alors deux repas par jour, un repas étant composé de légumes et un autre, de deux onces de pain.

De Pâques jusqu’au mois de septembre, c’est le jeûne ordinaire (on ne mange rien qui provient des animaux comme la viande et le fromage).

L’histoire du mouvement

L’origine du mouvement trappiste remonte au Moyen Âge, en Europe plus précisément. L’Europe connaît alors une période de ferveur religieuse. Certaines personnes ressentent le besoin de se retirer de la société pour mieux vivre leur foi. C’est précisément ce que font les Cisterciens.

L’ordre cistercien est fondé au VIe siècle par saint Benoît. Plusieurs communautés de moines se développent sous l’égide des Cisterciens. Une de ces communautés est l’ordre Trappiste. Le nom “trappiste” remonte au 12e siècle. En 1140 est fondé l’Abbaye du Breuil-Benoît de la congrégation de Savigny. L’abbaye se nomme d’abord Maison de Dieu, puis la Trappe (en référence au langage de Perche, dans lequel le mot trappe désigne les marches qu’il fallait descendre pour aller pêcher le poisson dans les étangs). C’est de là que vient l’appellation “trappiste”.

En 1663, l’Abbé de Rancé (Armand Jean Le Bouthillier de Rancé 1626-1700), directeur du monastère de La Trappe, décide de réformer l’ordre des Cisterciens. Il renforce la discipline au sein de l’ordre, tellement que des rumeurs commencent à circuler sur l’ordre.

Le développement de l’ordre Trappiste est temporairement interrompu lorsque l’ordre est chassé de France par la Révolution française. L’état français, hostile à l’ordre, confisque le monastère de la Trappe. Les Trappistes se réfugient alors en Suisse, puis en Russie. Sous la direction de Dom Augustin de Lestrange, ils reviennent en France en 1815 et rachètent le monastère. Des scissions dans l’ordre provoquent l’établissement de monastères distincts de la maison-mère en Belgique et en France.

En 1892, l’ordre cistercien est réformé et prend le nom d’ordre Cistercien de la stricte observance. Il s’agit d’un retour à la tradition des pères du XIIe siècle.

C’est un peu grâce à un coup de chance que les Trappistes s’établissent au Canada. Retournons en 1815. Des Trappistes s’apprêtent à prendre le bateau à Halifax pour retourner en France. Mais un des leurs, le Père Vincent Paul Merle, rate le bateau. Il décide de rester dans la région. Il projette d’implanter l’ordre trappiste en Amérique du Nord. Dès 1825, il fonde le monastère trappiste du Petit-Clairvaux à Tracadie, en Nouvelle-Écosse. Il faudra attendre 1862 pour que l’ordre fonde un autre monastère en Amérique du Nord. Il s’agit de la Trappe du Saint-Esprit, fondée à Sainte-Justine.

Au Canada, en deux siècles, 12 monastères trappistes ont été fondés. En 1881 est fondée l’Abbaye de Notre-Dame du Lac des Deux-Montagnes. L’année suivante est très chargée pour le mouvement Trappiste. D’abord, la communauté trappiste fondée par le Père Péloquin, à La Patrie, en Estrie, est dissoute. Ensuite, le monastère Notre-Dame des Prairies, au Manitoba et le monastère Notre-Dame de Mistassini, à Oka, sont fondés.

Les communautés Trappistes s’établissent au Canada surtout à la fin du siècle. Cela s’explique par les relations tendues entre l’état français et les communautés religieuses ce qui incite ces dernières à s’établir dans des pays plus accueillants comme le Canada.

Quelques monastères trappistes sont fondés à travers le Canada au 20e siècle. Signalons entre autres le monastère de Notre-Dame du Bon Conseil à Saint-Romuald (1902), le monastère Notre-Dame du Calvaire à Rogersville, près de Moncton, au Nouveau- Brunswick (1902), le Monastère de Notre-Dame de l’Assomption (1904), le Monastère du Val-d’Espoir, dans le canton de Percé (1931) , l’Abbaye de Notre-Dame de Nazareth (1902) ainsi que le Cistercian Monastery of Notre Dame (1977) situé en Ontario (à Georgetown et à Orangeville depuis 1982).

Quelle a été la contribution des Trappistes à la société canadienne?

  • De meilleures connaissances en agriculture. Les Trappistes faisaient beaucoup d’expériences dans ce domaine et ils enseignaient aux gens leurs découvertes (Institut agricole d’Oka).
  • Pionniers de la colonisation, ils ont défriché des terres comme à Sainte-Justine.

Dès 1859, le Père André Leyten, du monastère trappiste du Petit-Clairvaux à Tracadie (Nouvelle-Écosse), désire fonder un monastère au Canada. Sur les conseils du curé de Sainte-Claire, l’abbé Louis-Théodore Bernard, il décide de venir s’établir dans le canton de Langevin, nouvellement ouvert à la colonisation.

Le 24 juin 1862 marque l’arrivée des pères trappistes (les pères Placide, les frères Edmond et Clément ainsi que des compagnons) à Sainte-Justine. Une bonne partie du trajet sera fait à pied, peu de chemins étant ouverts à l’époque.

Les Trappistes ont d’abord été aidés par les colons de Sainte-Claire pour le voyage et la construction du premier bâtiment les abritant.

Le monastère reçoit dès 1863 ses premiers novices qui ont été recrutés en Europe (Père Yves, Père Guillaume, Père Antoine et Charles-Louis Verhulst). En 1867, la construction du monastère est achevée .

Au cours de son existence, le monastère accueillera une soixantaine de religieux, provenant majoritairement d’Europe et du Canada.

Provenance

Les Trappistes qui ont effectué un séjour à Sainte-Justine étaient nés dans les pays suivants. Entre parenthèse, on retrouve les répartitions.

  • Canada (32)
  • Hollande (11)
  • Belgique (10)
  • France (3)
  • Prusse (1)
  • Irlande (1)
  • Allemagne (1)
  • 1 Trappiste dont les origines sont inconnues

La sombre Trappe

C’est ainsi que l’on surnomme une série de légendes « où les moines sont obsédés par l’idée de la mort, creusent chaque jour leur tombe, sont tous des scélérats qui ont tué père et mère, s’établissent en des lieux malsains pour mourir plus vite, etc. »